dimanche 14 avril 2019

Souillure

As-tu déjà été souillé, camarade,
Comme on souille le plus vieux torchon ?
Comme un puéril maître de façade
Jette ses enfants dans les chiffons ?

Bois, camarade, car mon corps est sali
Et trop impur pour les entichements
De coin de table du vendredi,
Ce n'est plus celui d'avant !

Prends bien soin de finir ton verre,
Car le mien a été volé de moi
Lors d'union charognarde et de fer
Où l'on passe la mort au doigt.

As-tu déjà aimé, camarade,
Lorsque l'on s'éprend de passion,
Et que l'on se trempe dans une tornade
Charnelle et emplie de pulsions ?

Me croirais-tu si ce même vent
M'a mutilé jusqu'à m'effacer
En me délaissant dans mon sang
Froid et salement extirpé ?

Indignation ! Me diras-tu,
De ce vol acerbe et marital.
J'eus préféré prendre la rue,
Mais le coup m'était déjà fatal.

Mon camarade, as-tu déjà menti
Et passé pour un vieux pudibond ?
Simplement pour qu'elle eût sorti
Une seule seconde de ton corps, non ?

La mienne est morte par cent fois,
Réjouis-toi, camarade ! De son sort,
Même si elle ne goûta au fer que dans ma foi
Plutôt qu'au grand dehors.

J'aurais préféré périr, mais nous voilà,
Alors si je puis te demander
Si, sous ton propre toit, qu'une seule fois,
Camarade, tu as déjà été souillé ?



mercredi 10 avril 2019

Éclat

Ma tête qui tergiverse peine à oublier
D'intrusives pensées intemporelles
Qui persistent, malgré la force des années,
Comme une longue et infinie marelle
De jets de trop lourds rochers.

De vieilles blessures profondes,
Tel des noyés refont surface
En un effluve immonde
Sur un fleuve au courant tenace
Qui de sa puissance m'inonde.

À mort ! Les amourettes.
À tort ! La raison inerte.

Les incessantes, les tyrantes,
Qui m'ont trop souvent meurtri.
Les accaparantes, les violentes,
Encore nymphomanes de mon âme accroupie,
À vouloir la rendre défaillante.

Qu'elles se jettent du grand pont
Et, d'un éclat impossiblement sublime,
Propulsent l'intégralité de leur constitution
Au plus profond des abîmes
Dans une rouge explosion.